En cas d’événement de mer, la vie humaine peut se trouver menacée à trois niveaux : le navire lui-même à l’origine de l’accident, les autres navires ou installations potentiellement impliqués et les populations littorales lorsque l’accident ou la pollution qui en résulte se situe à proximité des côtes.
Sécurité des opérations à bord
La mer est un milieu hostile. Dans le monde du travail, les marins sont les plus exposés au risque d’accident. Malgré la multitude de normes internationales et européennes de prévision et prévention du risque, et de dissuasion, l’erreur humaine demeure à l’origine de près de 80 % des accidents maritimes.
Les dysfonctionnements observés révèlent des écarts dans l’application des réglementations, la veille en passerelle, le manuel de chargement, la formation, les effectifs notamment la capacité à communiquer dans une même langue de travail. Ils sont aussi étroitement associés à la densité exponentielle du trafic maritime, aux pressions économiques, au gigantisme des navires, à la vitesse, à la fatigue qui en résulte, aux tonnages croissants de substances dangereuses, aux dangers naturels prévisibles (tempêtes) ou imprévisibles (vagues scélérates).
Interactions entre les navires en cas d’accident
En dépit de la sophistication des instruments et aides à la navigation, les collisions entre navires demeurent une des principales causes d’accident avec parfois des conséquences dramatiques pour la vie humaine et l’environnement. Les abords des ports et les zones de forte concentration de trafic maritime, comme la pointe de la Bretagne et la Manche, sont particulièrement exposées à ce risque. Et le sauvetage en mer de personnes, équipages ou passagers, a fortiori blessées ou traumatisées, est toujours une opération délicate.
Ainsi par exemple, en 1991, au sortir du port de Livourne (Italie), le ferry Moby Prince heurte le pétrole Agip Abruzzo, chargé de 80 000 tonnes de pétrole brut léger. Les deux navires prennent feu et des explosions en chaîne se produisent à bord du ferry. Le bilan humain est lourd : 142 disparus à bord du ferry (un seul survivant) et des blessés graves à bord du pétrolier. En janvier 2018, la collision en mer de Chine entre le cargo CF Crystal et le pétrolier Sanchi entraîne, outre une importante marée noire, la disparition des 32 membres d’équipage de ce dernier, venant ainsi rappeler s’il en était besoin que ce type d’accident est toujours possible.
Mise en danger des populations littorales
Lorsque l’accident se produit à proximité des côtes, les populations littorales peuvent aussi être menacées en cas :
- d’émanations toxiques engendrées par un incendie à bord ;
- d’explosion si le navire est à proximité du littoral ou plus encore dans un port (avec le risque d’un effet domino sur les installations portuaires) ;
- d’arrivage de polluant dangereux sur le littoral (conteneur, fût ou vrac).
Lorsque le préfet maritime envisage une procédure d’accueil d’un navire en difficulté, son analyse prend en compte ces risques pour la population. Cependant, l’échouement d’un navire à la côte ou tout autre accident à proximité immédiate du littoral ou dans un port ne laissera pas toujours l’opportunité aux autorités maritimes d’éloigner le navire et, avec lui, les risques pour la population.
Les autorités terrestres doivent donc impérativement intégrer dans leurs plans de secours la possibilité de voir une paisible plage se transformer en un site industriel dangereux (type Seveso) afin d’anticiper les mesures d’évacuation ou de confinement de la population qui pourraient s’avérer nécessaires.
Quand le Junior M réveille le souvenir de l’Ocean Liberty…
Le 4 octobre1999, en raison d’une voie d’eau et d’une avarie empêchant l’assèchement des cales, le cargo égyptien Junior M, chargé de 6 900 tonnes d’ammonitrate, est dérouté vers Brest. La situation est délicate car elle réveille le douloureux souvenir de l’Ocean Liberty qui, en août 1947, chargé de 3 000 tonnes de ce même ammonitrate et de pièces mécaniques diverses, a explosé dans le port de Brest faisant 26 morts tandis que la déflagration et le métal incandescent ravageaient la ville.
Un périmètre de sécurité est dressé autour du Junior M. En raison de l’incapacité de l’armateur à faire cesser le danger, le navire reste à quai plusieurs semaines. En l’absence de solution adéquate, un mélange d’eau et d’ammonitrate est pompé quotidiennement et stocké dans une barge. Suite à l’abandon du navire par son armateur, c’est l’État qui doit trouver et financer les opérations de mise en sécurité du navire. Après analyse des risques pour l’environnement, 700 tonnes d’ammonium en solution sont finalement déversées au large en plusieurs fois. Le reste de la cargaison est vendu et évacué, début 2000, par voie ferrée tandis que le navire croupit plusieurs années dans le port de Brest avant d’être vendu pour ferraillage.